Communiqué de presse

CoDT bis : l’avis et les propositions des municipalistes wallons - Les délais de rigueur inquiètent fortement

Ce jeudi à Namur, Jacques GOBERT, Président de l’Union des Villes et Communes de Wallonie (UVCW) et l'équipe Développement territorial de l’UVCW, ont rendu public l’avis des municipalistes wallons en ce qui concerne le Code du développement territorial, aussi appelé CoDT Bis, en cours de révision au Parlement de Wallonie[1]. La question des délais de rigueur, jugés irréalistes et intenables, inquiète particulièrement les villes et communes, qui formulent des propositions de nature à contenter tout le monde sur le terrain (demandeurs de permis et autorités). 

« Dans le cadre de la tradition consultative wallonne, l’UVCW a été invitée à rendre avis sur le CoDT Bis. Notre Conseil d’Administration s’est déjà réuni à plusieurs reprises courant 2015 pour évoquer ce sujet essentiel, touchant au bon aménagement, au dynamisme entrepreneurial et à l’autonomie communale. Plusieurs points ont ainsi retenu notre attention et généré des remarques et mises en garde dans notre chef: les zones d’enjeu régional, les schémas de développement pluri-communaux, la qualité architecturale des bâtiments existants, les charges d’urbanisme et surtout, les délais de rigueur » explique Jacques GOBERT. 

L’épineuse question des délais de rigueur 

C’est sur ce dernier élément que  les représentants de l’association ont choisi d’insister lors de l’audition prévue en Commission de l’Aménagement du Territoire du Parlement de Wallonie ce jeudi 14 janvier. 

Non sans raison : il est évidemment essentiel de vérifier si le mécanisme ambitionné dans le texte régional en projet résiste à l’épreuve des pratiques et possibilités communales. 

Non sans arguments et retours d’expérience émanant du terrain local : en prévision de cet exercice démocratique, l’UVCW a tenu à consulter ses membres sur ce sujet sensible, par le biais d’une enquête approfondie menée en septembre et octobre 2015 auprès des services d’urbanisme des communes.[2] 

Des chiffres et une situation qui interpellent 

« Les résultats de notre enquête amènent des informations et réflexions précieuses pour éclairer les débats. Ils mettent en effet en lumière le caractère inadapté des délais de rigueur dans un nombre conséquent de situations », avertit le Président de l’UVCW. 

« Il apparaît clairement que, dans l’état actuel du texte, et malgré de potentielles réorganisations au sein des communes, les délais de rigueur ne sont pas adaptés à la réalité du terrain et vont entraîner nombre de frustrations, blocages et complexités administratives. Avec 56 % seulement des permis qui pourraient être délivrés dans les délais, les conséquences d’une application aveugle du mécanisme projeté sont innombrables et potentiellement désastreuses. 

Le constat rejoint les avertissements déjà formulés par l’UVCW, mais nous entrevoyons heureusement des remèdes efficaces, sans attenter aux objectifs et balises fixés par la réforme du CoDT ». 

1er constat : des délais manifestement trop courts 

Une première conclusion très nette est l’insuffisance des délais de 75 et 115 jours dans un nombre considérable de cas, même avec la prolongation prévue de 30 jours. Ces projets sont souvent les plus importants pour le développement (économique) communal et wallon. 

« Nous proposons en conséquence un parallèle entier avec la procédure d’autorisation applicable aux permis d’environnement en portant les délais à respectivement 90 et 140 jours, pour davantage de cohérence, et de façon à rendre possible le respect des délais pour un maximum de communes. Cette prolongation de 15 et 25 jours permettrait, selon une projection tirée de l’enquête, de tendre vers les 70 % de permis délivré dans les délais », détaille Tom DE SCHUTTER, Directeur du Développement territorial à l’UVCW. 

2ème leçon : les permis d’urbanisation appellent une réponse spécifique 

Ce rallongement des délais ne sera toutefois pas suffisant pour les permis d’urbanisation (véritable point noir de l’enquête) et certains projets urbanistiques complexes. 

« L’application des délais de rigueur à ces projets nécessite à notre sens qu’un maximum de questions soient vidées en amont du dépôt du permis. La solution consisterait à étendre le principe de la réunion de projet et à permettre à l’autorité compétente d’imposer une telle réunion même après réception d’une demande. Si ce correctif n’est pas adopté, le rythme imposé par les délais de rigueur sera notamment un obstacle à la négociation sereine et réfléchie des charges et conditions, question pourtant centrale de ces permis » argumente le Président de l’UVCW. 

3ème enseignement : les avis sont indispensables aux communes 

L’enquête fait apparaitre l’intéressante question des avis d’instances ou commissions. Certains avis sont reconnus indispensables par les communes pour décider en pleine connaissance de cause. A défaut, 93 % des services urbanismes avouent envisager de devoir statuer négativement sur le permis traité. 

« Pour éviter tout blocage, indépendant de la gestion communale, nous proposons que, d’une part, les avis techniques, comme les impétrants, puissent être demandés et fournis avant l’accusé de réception sur le caractère complet et recevable du dossier et que, d’autre part, certains avis reconnus essentiels[3] puissent épouser un régime similaire à celui qui vaut actuellement pour les avis du SRI[4]. Il n’y aurait donc pas de caractère favorable par défaut », avance Thibault CEDER, Conseiller expert à la cellule Aménagement du Territoire de l’UVCW. 

4ème message : les compléments d’information sont importants 

De ces avis ou de l’enquête publique découlent la question des compléments d’information pouvant être demandés par la commune à l’auteur de projet. Le mécanisme actuel empêche mathématiquement la collecte de tels compléments et fragilise dès lors juridiquement les permis délivrés. 

« Pour éviter cet écueil, l’UVCW suggère d’acter la possibilité pour l’autorité compétente de demander un complément d’information en cours de procédure, avec suspension du délai corollaire. Notre enquête démontre en effet que le délai complémentaire de 30 jours ne saurait couvrir cette éventualité », poursuit l’expert. 

5ème élément : des délais pour la décision, pas pour l’envoi 

Le coup de sonde démontre aussi qu’il est inutile et contreproductif d’exiger que l’envoi de la décision intervienne dans le délai. 

« Bien des procédures risquent d’être mises à néant pour une simple question logistique. Nous estimons que seule la décision devrait être prise dans le délai ; moyennant, le cas échéant, la mise en place d’une procédure d’information du demandeur », plaide Jaques GOBERT. 

Postposer de 12 mois l’entrée en vigueur des délais de rigueur 

En toute hypothèse, même si tous les aménagements proposés par l’UVCW étaient adoptés, le mécanisme des délais de rigueur risque de continuer de poser problème dans un certain nombre de cas.  Mais une partie des retards pourrait disparaître progressivement au fil de l’intégration par les communes des procédures CoDT. 

« A cet égard, nous soutenons que retarder quelque peu l’entrée en vigueur des délais de rigueur serait une occasion précieuse pour permettre aux communes d’intégrer les nouveaux concepts du CoDT et limiter ainsi les conséquences négatives d’une non-réponse dans les délais fixés. Nous proposons donc que l’entrée en vigueur des délais de rigueur – et seulement de ce point du CoDT – soit postposée de 12 mois après l’entrée en vigueur du CoDT », demande encore le Président de l’UVCW. 

La fin de la double sanction 

« Indépendamment de cette enquête, l’UVCW s’oppose toujours, depuis le 1er projet de texte, à une double sanction qu’elle estime inique : la commune ne peut aller en recours contre la décision du fonctionnaire délégué compétent sur expiration du délai de décision communale et est obligée de rembourser les frais de dossiers perçus lorsqu’elle n’a pas statué dans le délai. Cette logique de sanctions appliquées sans discernement est intolérable, en ce qu’elle présuppose un comportement fautif », rappelle Mr GOBERT. 

« En définitive, si le projet de CoDT Bis apporte des évolutions importantes et indispensables et si des adaptations au sein des communes permettront de tendre à la réalisation de l’objectif régional, les modifications actées méritent d’être complétées pour assurer la transition des régimes et la poursuite du développement économique, tout en gardant des délais raisonnables, porteurs de prévisibilité, de sécurité juridique, de bon aménagement du territoire et de respect pour l’autonomie communale », conclut le Président de l’UVCW. 

Annexes: 

Avis du Conseil d’Administration de l’UVCW relativement au CoDT et CoDT Bis ;

Enquête auprès des membres de l’UVCW en matière de délais de rigueur (sept’/oct’ 2015). 

Contact: Michel L’HOOST, Conseiller Presse & Communication UVCW (+32 496 50 99 45 - michel.lhoost@uvcw.be)


[1] Projet de décret abrogeant le décret du 24 avril 2014 (Code du Développement territorial – CoDT) abrogeant les articles 1er à 128 et 129quater à 184 du Code wallon de l’Aménagement du Territoire, de l’Urbanisme, du Patrimoine et de l’Énergie (CWATUPE), abrogeant les articles 1er à 128 et 129quater à 184 du CWATUPE.

[2] La fiche technique et l’enquête exhaustive sont repris en annexe au présent communiqué de presse.

[3] Et dont une liste exhaustive pourrait être dressée : Direction des Routes, Direction du Développement rural, Direction des Cours d’eau non navigables, Département de la Nature et des Forêts, SNCB, Direction des Voies hydrauliques, OTAN, Défense, etc.

[4] A l’expiration du délai qui est laissé au service incendie pour se prononcer, l’avis qu’ils doivent rendre n’est pas considéré comme « favorable par défaut ». Il est donc possible pour la commune, si les délais de procédure permis le permettent, d’attendre encore un peu l’avis des pompiers pour analyser utilement la demande de permis.

 
Copyright © 2016 Union des Villes et Communes de Wallonie asbl - www.uvcw.be