Communiqué de presse

Les finances locales, toujours malmenées

En prélude à l'Assemblée générale de l'Union des Villes et communes de Wallonie (UVCW) ce 13 mai à Namur, Jacques GOBERT, Président de l'UVCW, a dressé le bilan de l'année communale 2015. Dans un contexte financier qui reste extrêmement tendu et anxiogène, notamment en raison des bombes à retardement du Tax shift et des pensions des agents des pouvoirs locaux, les municipalistes wallons ont tout de même trouvé quelques raisons d’espérer et se réjouir. Quelques dossiers ont satisfait aux revendications communales, tandis que le thème central de l’AG - les villes de demain : inclusives, durables et prospères - est porteur de promesses en termes de bien-être local et d’efficience dans le service rendu aux citoyens et aux entreprises. 

Les finances locales, toujours très préoccupantes 

Les communes wallonnes restent confrontées à des mesures, tant européennes, que fédérales ou régionales, impactant leurs sources de financement comme leurs dépenses: trajectoire budgétaire, pensions, zones de secours et de police, explosion de l'aide sociale, redevance kilométrique, déchets… Leurs marges de manœuvre demeurent extrêmement faibles, et leurs investissements s’en ressentent nettement. 

Le Tax shift fédéral, un cocktail délétère pour les communes 

Les communes subissent les désavantages du Tax shift, avec l'impact négatif sur leurs additionnels de la réduction de l'IPP (une perte de 3,3 millions € au budget 2016, mais de 94 millions € en vitesse de croisière en 2021), mais ne bénéficient pas des mesures allégeant les charges des employeurs (de 33% à 25%), alors que les pouvoirs locaux wallons emploient 130.000 agents[1], c'est une injustice criante! 

Si le saut d’index vient certes soulager les trésoreries municipales de 37 millions €, ce montant ne compense même pas le hold-up fédéral de la taxation des intercommunales à l’impôt des sociétés (38 millions €). L’UVCW a dès lors contesté cette mesure devant la Cour constitutionnelle

L’allègement d'impôts et de charges sociales que l'Etat offre aux citoyens et aux entreprises, il le fait payer aux communes…c'est un intolérable transfert de l'impopularité fiscale du Fédéral vers l'échelon local ! 

Zones de police et de secours : le 50/50 s’éloigne 

L'intervention communale pour les zones de police connait une hausse régulière (+7% en 2015), essentiellement liée aux surcoûts des charges de pensions et à l’insuffisance de la dotation fédérale. Les villes et communes exigent la neutralité budgétaire stricte et le refinancement fédéral des zones (actuellement financées à 63% par les communes et à 37% par l’Etat (60%-40% en 2014)). 

De leur côté, les interventions communales dans le financement des zones de secours restent 65 millions €  trop élevées au regard du ratio de financement 50/50 qu’elles attendent toujours. 

Action sociale : la coupe déborde 

Le transfert de charges de l'ONEM vers les CPAS (60 millions € de surcoûts nets à charge des CPAS), conjugué à l'augmentation de 16 % du nombre de bénéficiaires d'un Revenu d'intégration sociale (RIS) en 2015 et aux surcoûts de l'accueil de 5.000 demandeurs d'asile en Initiatives locales d’Accueil (ILA) suite à la crise des réfugiés, représente un triple déplacement du socle de solidarité vers les pouvoirs locaux ! Vu la faiblesse des moyens humains et financiers qui sont les leurs, les CPAS ne sont plus à même de faire face à leurs missions d’une façon efficace, digne, humaine. C’est proprement inadmissible ! 

Pensions des pouvoirs locaux : une bombe à retardement 

Si la mise en place d'une pension mixte et d'un second pilier pour les contractuels rencontrent deux exigences historiques de l’UVCW pour contenir les dépenses, une intervention fédérale dans le financement des pensions des agents statutaires communaux n’est toujours pas envisagé, alors que l’Etat soutient tous les autres systèmes de pensions. La croissance de cette charge est exponentielle et démentielle: le surcoût cumulé pour les pouvoirs locaux wallons atteint déjà 224 millions € aujourd’hui ! 

Les mesures régionales : la neutralité budgétaire n’est plus assurée

 Malgré l’indexation du Fonds des communes (inflation + 1%), les villes et communes wallonnes déplorent la diminution de 6,7 millions € de l’enveloppe, d'1,2 million € de compensation des réductions de précompte immobilier et de 20 millions € de l'enveloppe des programmes triennaux depuis la mise en œuvre du Fonds régional pour les investissements communaux

L’UVCW relève cependant 2 mesures positives: la hausse de 5 millions € du budget de la politique des grandes villes (PGV) et la création d'un Fonds régional de cohésion sociale, doté dès 2020 de 25 millions € chaque année, auquel communes et CPAS auront accès sur base d'un mécanisme de droit de tirage. 

Les municipalistes du Sud dénoncent surtout le tax shift déchets: le coût de la gestion des déchets augmente de 17 millions € que les communes répercuteront sur les citoyens-consommateurs en vertu du coût-vérité. Là aussi, 2 mesures positives sont toutefois saluées : dans le calcul du coût-vérité, la logique de sanction évolue vers une philosophie d'accompagnement, tandis que les "terres de voirie" seront réutilisables à certaines conditions. Une vieille revendication de l’UVCW se voit ainsi rencontrée. 

Redevance kilométrique : on fait fausse route ! 

Les villes et communes suivent de très près la redevance kilométrique, car elles sont impactées à plusieurs égards. Il y a d’abord un réel risque de report de trafic vers le réseau des voiries communales, qui appelle une vigilance locale et régionale. Ensuite, la réduction des additionnels communaux issus de la taxe de circulation pour les camions soumis à la redevance d'usage, que la Wallonie s’est engagée à compenser. Enfin, l’UVCW exige l’exonération de la redevance pour les camions affectés à des missions de service public (collecte des déchets, entretien de la voirie, déneigement, etc.). Sur ces 2 aspects comme sur tout le reste, la neutralité budgétaire des décisions régionales doit être garantie pour les communes. 

Forte inquiétude sur les aides à l’emploi 

La réforme des aides à l’emploi (spécialement les Aides à la promotion de l’Emploi – APE) préoccupe logiquement beaucoup les villes et communes, car plus de 20% des agents des pouvoirs locaux sont contractuels subventionnés, soit 30.000 agents concernés. Aucune commune ne peut perdre dans l’aventure ! L’UVCW plaide dès lors pour que la rationalisation respecte absolument le principe de neutralité budgétaire, commune par commune, tant pour la valeur des points que pour le mécanisme de réduction des cotisations sociales.

 Investissements locaux : la règle d’or européenne se mue en chape de plomb 

Conséquence de la rigidité aveugle des règles européennes de contrôle du déficit et de l'endettement des Etats membres, la chute des investissements communaux se poursuit : les engagements sont passés de 800 millions € au compte 2010 à 600 millions € au compte 2014. 

Les investissements sont un puissant levier pour l’économie régionale: les commandes publiques permettent de construire et rénover logements, crèches, hôpitaux, maisons de repos, infrastructures de mobilité, indispensables à la viabilité des PME wallonnes du secteur BTP (construction et voirie) et au service au citoyen. Des pistes existent pour préserver cette capacité locale à investir. 

A l’échelon régional, il faut s’interroger quant à l’opportunité de maintenir la balise annuelle d’emprunt (180 €/hab./an), qui agit comme un corset étouffant.

Au niveau intra-belge, l’Etat fédéral, les Régions et les pouvoirs locaux pourraient contribuer à l'atteinte des objectifs du Pacte européen de stabilité, au prorata inverse de leurs investissements. L’UVCW aime rappeler que 40% des investissements publics en Belgique sont assurés par les pouvoirs locaux, qui ne pèsent que 5% dans l'endettement. 

Ce message percole jusqu’aux cénacles européens, via le CCRE[2]. La Commission s’est vue adresser une motion pour plus de flexibilité dans l'analyse du respect de la trajectoire budgétaire, le feu vert aux dépenses d'investissement et l’adaptation des normes comptables SEC pour pouvoir les amortir. Bref, il est temps de mettre fin à la flagrante contradiction entre une politique européenne de relance des investissements  (Plan Juncker et des décisions de la BCE) et un Pacte de stabilité qui les étrangle. 

Conclusion de ce bilan financier 

Les charges transférées indûment aux pouvoirs locaux s'élèvent pour  2015 à 38 millions € pour les charges régionales, et à 203 millions € pour les charges fédérales, auxquelles il faut ajouter 224 millions € d'insoutenable surcoût des pensions communales. Pas de quoi faire la fête dans les hôtels de ville, on en conviendra… 

« Si on veut rendre Demain possible, il ne faut pas désargenter les communes », ponctue Jacques GOBERT.

Annexe : communiqué de presse relatif à l'AG du 13 mai : Quelles villes et communes demain ?

Parcourir le rapport annuel 2015 de l’UVCW (texte intégral) : http://www.uvcw.be/publications/online/ 

 

Contact : Michel L’HOOST, Conseiller Presse & Communication UVCW (+32 496 50 99 45 michel.lhoost@uvcw.be )


[1] 100.000 en équivalent temps plein

[2] Le Conseil des Communes et Régions d’Europe, la fédération européenne des pouvoirs locaux.

 
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