Sécurité routière : un plan d’action wallon déclinable localement
Le Gouvernement wallon a approuvé, le 11 décembre 2025, les grandes orientations du plan d’action 2026-2030 du Conseil supérieur wallon de la sécurité routière (CSWSR) pour des routes plus sûres.
Le plan d’action proposé par le CSWSR est l’aboutissement des Etats généraux de la sécurité routière 2025 : une démarche collective et concertée impliquant divers acteurs œuvrant dans le domaine de la sécurité routière, dont des représentants des pouvoirs locaux[1]. L’objectif des Etats généraux de la sécurité routière, qui ont lieu tous les cinq ans, est de formuler des recommandations à l’attention du Gouvernement wallon.
Pour cette édition, la volonté du Gouvernement a été de transposer les recommandations formulées dans un plan d’action concret et ambitieux, engageant l’ensemble des acteurs concernés, dont les pouvoirs locaux. Ce plan d’action, conçu pour être déclinable localement, est destiné à devenir un outil concret et efficace que chaque ville et commune pourra s’approprier en fonction de ses priorités et des spécificités de son territoire, à l’échelle d’une zone de police. Ce plan d’action a été dévoilé lors de la clôture des Etats généraux le 14 novembre 2025[2].
Objectif : la Vision Zéro à l’horizon 2050
Le Gouvernement wallon, dans sa Déclaration de politique régionale s’est fixé un objectif en matière de sécurité routière : atteindre la Vision Zéro en 2050, c’est-à-dire zéro mort sur nos routes. Pour y arriver, une étape intermédiaire a été fixée lors du lancement des Etats généraux de la sécurité routière : moins de 100 décès et moins de 400 blessés graves d’ici 2030.
Malgré des progrès récents en Wallonie, notamment une baisse des tués et blessés graves depuis 2019, la Région wallonne affiche encore un taux de mortalité routière supérieur à celui des autres régions belges et à la moyenne européenne, ce qui montre l’ampleur de la marge de progression possible.
Pour relever ce défi et élaborer le plan d’action, les États généraux de la sécurité routière se sont appuyés sur l’approche Safe System, qui part du principe que l’être humain est vulnérable et que c’est au système de mobilité de s’adapter. Ce dernier doit donc s’appuyer sur des infrastructures qui pardonnent les erreurs, des véhicules plus sûrs, des vitesses adaptées, des usagers responsabilisés et des secours efficaces.
Un processus collaboratif
Dans le cadre des Etats généraux de la sécurité routière, différents groupes de travail se sont vus confier la mission de proposer, sous l’angle de l’approche Safe System, des solutions innovantes, en phase avec les réalités locales et répondant à sept thématiques :
1) La mobilité sûre vers les écoles,
2) La mobilité professionnelle,
3) La conduite sous influence d'alcool et de drogue,
4) La formation à la conduite,
5) La vitesse,
6) La distraction,
7) Les usagers vulnérables et le partage de la route.
Parallèlement à ces groupes de travail, un Comité d’évaluation a été mis en place afin de classer les mesures proposées selon leur pertinence, leur impact et leur faisabilité et cela au moyen d’une grille de critères objectifs et pertinents afin de garantir une base méthodologique solide et partagée. Six critères d’évaluation des mesures ont été retenus :
1) L’impact sur la sécurité routière,
2) La résistance citoyenne,
3) La rapidité de mise en œuvre,
4) Le budget annuel global,
5) Les freins administratifs ou législatifs,
6) Les synergies publiques.
La démarche a abouti à une liste consolidée de 51 mesures opérationnelles priorisées au regard du score obtenu après évaluation selon les six critères choisis. Elles ont été complétées par des mesures liées à la gouvernance du processus. Les différentes mesures ont été transposées en fiches-actions détaillées, efficaces et réalistes.
Les mesures proposées visent à renforcer la sécurité routière en Wallonie, en impliquant les communes dans plusieurs domaines : aménagements sécuritaires (hiérarchisation du réseau, traversées piétonnes, abords d’écoles, etc.), formation des citoyens tout au long de la vie et sensibilisation via les campagnes de l’Agence wallonne pour la sécurité routière (AWSR).
Ces mesures ont été soumises au Conseil d’administration de l’Union des Villes et Communes de Wallonie en septembre 2025, préalablement à leur validation par le Conseil supérieur wallon de la sécurité routière[3]. Le Conseil d’administration partage les ambitions du Gouvernement wallon en matière de sécurité routière et s’est prononcé en faveur du plan d’action proposé, notamment en matière de sensibilisation et communication au public. Cependant, il a souligné la nécessité de prévoir des moyens humains, financiers et techniques adaptés aux pouvoirs locaux pour assumer toute nouvelle mission en matière de sécurité routière. Des outils d’analyse accessibles et une formation solide pour leurs agents, afin de garantir une mise en œuvre réaliste, coordonnée et durable des actions, sont notamment souhaités.
Le Conseil supérieur wallon s’est emparé du travail des GT et du Comité d’évaluation pour finalement déterminer et choisir les mesures qui figurent dans le plan d’action 2026-2030 pour des routes plus sûres. Sept mesures régionales et dix mesures communautaires et fédérales ont été validées.
Le plan d’action 2026-2030, pour des routes plus sûres
Le plan d’action 2026-2030[4] pour des routes plus sûres comporte deux volets complémentaires.
Le premier volet, régional et local, comprend les mesures qui reposent sur les compétences de la Région wallonne. Elles ne pourront cependant pas montrer leur pleine efficacité sans l’implication des communes et des zones de police, au plus près des réalités quotidiennes. C’est pourquoi ce projet consacre un axe spécifique aux initiatives à déployer au niveau communal, afin que chaque autorité locale puisse s’approprier la dynamique proposée et l’adapter à ses priorités et spécificités.
Le second volet, communautaire et fédéral reprend des mesures qui relèvent d’autres niveaux de pouvoir. La sécurité routière est en effet une responsabilité partagée. Ces mesures sont présentées sous forme de fiches argumentaires à défendre auprès des interlocuteurs concernés.
En outre, une attention particulière a été portée, tout au long de l’élaboration du plan d’action, à sa cohérence avec les autres politiques régionales. L’intégration des orientations du Plan Air Climat Énergie (PACE), du Plan Social Climat et du Plan Wallonie cyclable a permis d’identifier des leviers communs et de renforcer les synergies avec d’autres priorités publiques.
Les sept mesures du volet régional sont regroupées en quatre axes fondamentaux et déclinées en 14 actions opérationnelles.
L’axe 1 vise à améliorer l’environnement routier, un levier essentiel pour réduire les erreurs humaines et protéger les usagers, surtout les plus vulnérables. Pour la Wallonie et les communes, ce domaine est prioritaire, car il influence directement les comportements et favorise une mobilité plus sûre. Bien que coûteuses, ces interventions offrent des bénéfices humains et sociaux importants, d’où la nécessité de cibler les mesures les plus efficaces.
La première mesure consiste à réduire les vitesses pratiquées, non seulement via les limitations légales, mais en restructurant le réseau pour en renforcer la cohérence et la lisibilité.
La deuxième vise à sécuriser les usagers actifs, dont la présence accrue augmente l’exposition au risque. Trois priorités se dégagent : sécuriser les traversées piétonnes, améliorer les trajets scolaires et renforcer la protection aux abords des chantiers grâce à une application stricte des recommandations. L’objectif est de rendre l’espace public plus sûr et plus inclusif.
Enfin, la troisième mesure consiste à identifier et traiter les zones à risque en combinant l’analyse des infrastructures, des accidents et du ressenti des usagers. Cette approche permet de hiérarchiser les interventions et d’optimiser les investissements publics dans un contexte budgétaire limité.
La sensibilisation à la sécurité routière constitue le cœur de l’axe 2. Elle contribue à faire évoluer les mentalités et à ancrer des comportements responsables sur le long terme. Toutefois, son efficacité dépend de l’existence de contrôles et de sanctions crédibles.
Une première mesure vise à renforcer la sensibilisation du public, à travers des campagnes ciblant les principaux facteurs de risque, ainsi que par une formation continue tout au long de la vie. La seconde mesure s’adresse au monde professionnel?: elle concerne les chauffeurs professionnels, mais aussi l’ensemble des travailleurs amenés à conduire, puisque près d’un accident sur dix survient sur le trajet domicile?travail.
L’axe 3 porte sur le respect des règles de circulation, condition indispensable à l’efficacité des autres actions. Le Code de la route n’est pas une simple liste d’obligations?: il garantit une circulation fluide, équitable et sûre. Les contrôles routiers jouent un rôle essentiel de prévention et de rappel collectif. Ils permettent de détecter les infractions, de faire respecter les règles et de sensibiliser les conducteurs à leur responsabilité individuelle.
Les mesures de cet axe visent donc à renforcer les contrôles et la visibilité policière, en ciblant particulièrement les lieux, moments et facteurs de risque les plus problématiques. Elles prévoient également d’améliorer la communication autour des contrôles afin d’accroître la perception, par les usagers, du risque d’être contrôlé.
L’axe?4 est dédié aux communes et zones de police. Proches des réalités de terrain, les pouvoirs locaux disposent d’une connaissance fine des infrastructures, des comportements, des usages et des enjeux de mobilité propres à leur territoire. Ils sont donc particulièrement bien placés pour identifier les zones à risque, cibler les publics sensibles, adapter les messages de prévention et impliquer les habitants dans des démarches participatives.
Le plan d’action prévoit ainsi de renforcer leur rôle en mettant à leur disposition une boîte à outils régionale rassemblant des ressources pratiques, méthodologiques et financières. L’objectif est de les accompagner depuis le diagnostic de leur situation (accidentalité, causes, publics vulnérables…) jusqu’à la mise en œuvre d’actions adaptées.
L’enquête menée par l’AWSR avant les États généraux a révélé des attentes claires de la part des acteurs locaux?: un meilleur accès aux données, un partage de bonnes pratiques, des exemples de plans d’action et des moyens financiers adéquats. La mesure proposée par le CSWSR s’organise autour de trois étapes?: dresser l’inventaire des outils et ressources existants, définir un parcours type d’évaluation et de priorisation, et proposer des mécanismes de financement adaptés.
Cet accompagnement vise à renforcer la capacité des communes à développer une politique de sécurité routière cohérente avec les objectifs du plan d’action.
Un premier outil : l’Observatoire de l’accidentalité locale
L’Agence wallonne pour la sécurité routière met à disposition des pouvoirs locaux, l’Observatoire de l’accidentalité locale[5]. Cette plateforme a été conçue pour accompagner les acteurs de sécurité routière en leur fournissant des données claires, précises et visuelles sur les accidents de la route.
Trois outils y sont actuellement proposés :
- Une carte interactive des accidents corporels, localisant avec précision chaque accident ;
- Une carte de densité des accidents corporels, permettant d’identifier les zones à forte concentration d’accidents ;
- Un tableau de bord offrant des statistiques détaillées relatives aux accidents corporels survenus sur un territoire au choix.
Cette plateforme permettra :
- de visualiser finement les accidents survenus sur le territoire de la commune,
- d’en analyser les caractéristiques locales,
- d’identifier les zones prioritaires d’intervention,
- et de soutenir la mise en œuvre d’actions concrètes et proportionnées aux enjeux spécifiques locaux.
Le souhait, à travers cette démarche, est de renforcer la capacité d’analyse et de décision des communes et zones de police, et de leur fournir un appui opérationnel directement utilisable dans leurs politiques de prévention, de sensibilisation ou de répression.
L’accès à cette plateforme est réservé aux professionnels et se fait via une connexion sécurisée avec identifiant et mot de passe. L’inscription doit être demandée via ce formulaire.
[1] https://www.uvcw.be/mobilite/actus/art-9331
[2] https://egsrw2025.be/index.php/programme-14-11-2025/
[3] Avis du CA UVCW du 9.9.2025 (v. fichier ci-dessous)
[4] https://egsrw2025.be/wp-content/uploads/2025/11/EGSRW-Propostion-de-plan-daction-du-CSWSR-2026-2030.pdf


