Les communes bénéficient désormais d’un Fonds des communes au service extraordinaire à travers le FERI et la Dotation Grandes Villes
C’est une petite révolution qui se joue aujourd’hui dans le domaine du financement régional des investissements communaux. Afin de garantir une prévisibilité financière aux communes et de gagner en simplification administrative, la région met un place une structure qui permettra d’articuler les différents modes de subventionnement, allant de la dotation générale non affectée à la dotation pour missions spécifique sans oublier les appels à projets. L’Union se réjouit de ce changement de cap, qu’elle revendiquait depuis de nombreuses années.
Dans sa Déclaration de politique régionale, le Gouvernement wallon avait annoncé la mise sur pied d’un Fonds des communes extraordinaire. Une note d’orientation, qui trace les principes directeurs de ce futur Fonds extraordinaire régional d’investissement (FERI) et sur laquelle nous avions rendu un avis, a été adoptée en avril 2025 par le Gouvernement. Un décret-programme modifiant le CDLD, sur lequel nous nous étions également prononcé, vient d’être adopté ce 18 décembre pour mettre en œuvre cette réforme.
Dès le 1er janvier 2026, le Fonds régional pour les investissements communaux (FRIC) sera remplacé d’une part par le nouveau Fonds Extraordinaire Régional d'Investissements (FERI) pour les communes jusqu’à 50.000 habitants et d’autre part, par la Dotation Grandes Villes pour les villes de plus de 50.000 habitants. La Politique des Grandes Villes (PGV) disparaît également pour venir se fondre dans la nouvelle Dotation Grandes Villes.
Outre les noms qui s’effacent, c’est aussi une petite révolution qui s’opère puisque dorénavant, tant le FERI que la Dotation Grandes Villes permettront d’octroyer à respectivement 243 villes et communes et 9 grandes villes, soit l’ensemble des 252 communes wallonnes francophones, une dotation annuelle extraordinaire libre de toute affectation.
Dans le cadre du FRIC, les investissements devaient concerner la construction ou la rénovation de voiries, de bâtiments publics (crèches, CPAS, services publics…), d’égouts, de parkings, certains travaux liés à l’éclairage public, les plaines de jeux récréatives, les voiries et espaces communautaires des zones d’habitat permanent ou encore les aménagements des cimetières. Quant à la Politique des Grandes Villes, elle permettait de financer les actions qui étaient contenues dans une Perspective de Développement Urbain (PDU) et elles pouvaient concerner tant des dépenses d’investissement que des frais de personnel et de fonctionnement.
Désormais, avec le FERI et la Dotation Grandes Villes, les villes et communes ne seront plus tenues d’affecter les moyens financiers reçus à un type d’investissement bien précis. A l’instar de ce qui se fait déjà au service ordinaire à travers le Fonds des communes, ce nouveau mécanisme de financement général permettra aux communes d’utiliser librement la nouvelle dotation qui les concerne pour financer tout investissement de leur choix, y compris les investissements réalisés dans le cadre de projets supracommunaux.
Tant les communes relevant du FERI que celles relevant de la Dotation Grandes Villes devront inscrire leur dotation respective à l’exercice propre du service extraordinaire en recette de transfert. Cependant, les communes relevant du FERI pourront transférer, en tout ou partie, cete dotation à l’exercice propre du service ordinaire afin de financer exclusivement des dépenses ordinaires de dette. Quant aux grandes villes, elles pourront transférer, en tout ou partie, leur dotation à l’exercice propre du service ordinaire pour un montant équivalent à l’addition de leurs dépenses en matière de police, de zone de secours, de CPAS et de pension. Le décret-programme a adapté le règlement général de la comptabilité communale afin de permettre ces transferts bien précis entre le service extraordinaire et le service ordinaire.
Montants et répartition
Le montant du FERI pour l’année de répartition 2026 est fixé à 43,44 millions d’euros. Cela correspond au montant qui était réservé jusqu’ici pour le FRIC pour les 243 communes concernées. Ce montant a fait l’objet d’une indexation par rapport aux montants dédiés à la programmation précédente. On notera cependant que le budget complémentaire de 20 millions d’euros annuels octroyé au FRIC dans le cadre du Plan wallon d’investissement, puis du Plan de relance, pour la mandature 2019-2024 n’a pas été prolongé.
La dotation qui sera attribuée à chaque commune qui bénéficie du FERI a été fixée au prorata de la quote-part moyenne de chaque commune dans les dispositifs de financement PIC 2019-2021 et 2022-2024 du FRIC. La quote-part ainsi obtenue pour chaque commune par rapport à l’enveloppe globale qui sera disponible ne sera pas amenée à évoluer dans le temps.
Pour rappel, les critères de répartition utilisés dans le cadre du FRIC étaient d’une part le kilométrage des voiries communales revêtues, le nombre d’habitants et le revenu moyen par habitant pour 2/3 de l’enveloppe et, d’autre part, les critères utilisés dans le cadre du Fonds des communes pour le dernier tiers de l’enveloppe. Par ailleurs, aucune commune ne pouvait bénéficier de plus de 5 % de cette enveloppe budgétaire globale. Si tel devait être le cas, le surplus est réparti, selon les mêmes règles, au profit des communes de la même province. Un subventionnement minimum et maximum par habitant et par an à l’échelle provinciale était également prévu.
Quant à la Dotation Grandes Villes, qui concerne Charleroi, La Louvière, Liège, Mons, Mouscron, Namur, Seraing, Tournai et Verviers, le montant individuel attribué à chacune de ces villes pour l’année 2026 est fixé dans le CDLD, ce qui équivaut à un total de 28,39 millions d’euros. L’enveloppe budgétaire consacrée à cette dotation intègre celle qui était réservée aux 9 grandes villes dans le cadre du FRIC, montant indexé par rapport à la programmation précédente mais hors budget complémentaire évoqué plus haut, ainsi que l’enveloppe réservée jusqu’ici à la Politique des Grandes Villes. Etant donné que la répartition de la Dotation Grandes Villes se traduit en montants individuels inscrits dans le CDLD, cette répartition est aussi figée sur base de la répartition qui prévalait jusqu’ici tant dans le cadre du FRIC, pour la partie de financement relevant de ce dispositif, que dans le cadre de la PGV pour la partie du financement restant.
Nous avons rappelé plus haut les critères de répartition qui prévalaient pour le FRIC. En ce qui concerne ceux utilisés dans le cadre de la Politique des Grandes Villes, précisons tout d’abord que ce dispositif ne concernait que 7 de ces grandes villes sur 9 étant donné que la Grande Ville était définie comme étant une commune à caractère urbain dont la population dépasse 50.000 habitants, et dont le revenu moyen net par habitant était inférieur au revenu moyen net wallon. Sur cette base, Charleroi, La Louvière, Liège, Mons, Mouscron, Seraing et Verviers bénéficiaient de ce dispositif, ce qui n’était pas le cas pour Namur et Tournai. L’enveloppe relevant de ce dispositif, à savoir 12.264.000 €, était répartie entre les 7 Grandes Villes concernées sur base de deux critères : la taille de la population (75 %) et le revenu moyen net par habitant (25%). Lors des débats parlementaires relatifs au décret-programme[1], le Ministre des Pouvoirs locaux a cependant précisé que Tournai, qui n’était pas intégrée jusqu’ici dans la PGV, obtient désormais un financement équivalent à celui d’une ville de taille équivalente sur base de crédits nouveaux qui ont pu être dégagés. Quant à Namur, elle voit sa subvention actuelle « Namur capitale » pérennisée via ce décret-programme mais ce montant qui lui est propre n’est pas repris dans cette Dotation Grande Ville mais dans une dotation à part.
Bien qu’un mécanisme d’indexation était envisagé au départ, un tel mécanisme n’est pas prévu dans le décret qui met en œuvre le FERI et la Dotation Grandes Villes. Pour le FERI, il est néanmoins précisé que ce fonds est fixé annuellement à un montant au moins égal à celui de l’année précédente. Quant à la Dotation Grandes Villes, le décret prévoit que la dotation attribuée à chaque commune est au moins égale à celle octroyée l’année précédente.
Pour la fin mars au plus tard de l’année de répartition, la dotation FERI ou Grandes Villes sera notifiée aux communes concernées et celle-ci leur sera intégralement versée au plus tard le 31 mars de l’année qui suit l’année de répartition.
On notera que fin novembre 2025, toutes les villes et communes ont reçu une circulaire ministérielle leur indiquant les montants qu’elles recevront pour l’année 2025 ainsi que ceux qu’elles seront amenées à recevoir pour la période 2026-2030, que ce soit dans le cadre du FERI ou dans le cadre de la Dotation Grandes Villes.
Simplification administrative et contrôle des comptes
Passer d’un mécanisme de financement spécifique à un mécanisme de financement général entraîne par ailleurs une simplification administrative de taille. Toute une série d'actes administratifs que les communes devaient auparavant remplir pour bénéficier du financement régional ainsi que l’obligation d’un pourcentage d’apport de fonds propres, qui prévalait pour le FRIC uniquement, sont supprimés puisqu’il n’est désormais plus question d’affecter le financement à un investissement bien précis. On passe ainsi d'une culture de contrôle à une culture de confiance.
Dans le cadre du FRIC, les communes étaient tenues d’élaborer un plan d’investissement communal (PIC) sur trois ans reprenant l’ensemble des projets qu’elles envisageaient de réaliser au cours de chaque année de la programmation pluriannuelle concernée, compte tenu d’un taux de subvention régionale de 60 %. Ce PIC devait être approuvé par le Gouvernement. S’ensuivaient ensuite d’autres étapes d’approbation. En effet, une fois le PIC approuvé, la commune élaborait les dossiers techniques ainsi que les cahiers des charges des projets du plan et les soumettait à l’approbation du Gouvernement. Après approbation du dossier technique, la commune élaborait le dossier d’attribution des marchés en question et lançait la procédure de passation du marché. La décision d’attribution devait être approuvée par le Gouvernement. Le contrôle de bonne utilisation des subsides se faisait a posteriori à l’issue des différents projets réalisés et dans son ensemble. Il était alors question de vérifier que l’enveloppe attribuée à la commune avait été utilisée entièrement et pour les fins auxquelles elle était destinée. Par ailleurs, pour être éligibles, les projets devaient aussi avoir fait l’objet d’une attribution de marché entre le 1er janvier de la première année de programmation et le 31 décembre de la dernière année, ce qui engendrait un pic d’attributions en fin de période et faisait ainsi gonfler les prix, compte tenu de la loi de l’offre et de la demande.
Dans le cadre de la Politique des Grandes Villes, les villes concernées devaient faire approuver par le Gouvernement wallon leur perspective de développement urbain (PDU), qui identifiait les ambitions transversales et actions que la Ville souhaitait mettre en œuvre au cours de la législature communale, en particulier dans les quartiers prioritaires. Par l’approbation de cette PDU, la région s’engageait à financer les actions qui y étaient reprises. S’ensuivaient ensuite deux mécanismes de contrôle de l'usage des montants octroyés dans le cadre de la PGV. Le premier consistait à transmettre un état de dépenses chemin faisant, dans le cadre de la mise en œuvre de chaque action. Le second consistait en l’élaboration d’un rapport intermédiaire puis d’un rapport d’évaluation.
Tant dans le cadre du FERI que de la Dotation Grandes Villes, il n’y aura plus de programmation des investissements à établir pour le compte de la Région et il n’y aura plus de contrôle a priori. On notera cependant que le budget communal devra dorénavant comporter la liste des investissements prévus par la commune. Pour chaque projet d’investissement, cette liste mentionnera le descriptif de chaque projet et le montant total pluriannuel envisagé. Le décret-programme a en effet adapté le règlement général de la comptabilité communale en ce sens.
Il n’y aura plus non plus de stade d’approbation au niveau de la mise en œuvre des projets, tel qu’il prévalait dans le cadre du FRIC. Cela n’exonère cependant pas les communes, faut-il le rappeler, de rester soumises aux règles qui s’appliquent en matière de marchés publics.
Dans le cadre du FERI, un contrôle a posteriori sera effectué par la Région mais il se fera sur base des comptes communaux et n’engendrera par conséquent aucune démarche supplémentaire pour les communes. Ce contrôle se limitera à vérifier que la dotation a bien été utilisée dans un délai raisonnable pour financer des investissements communaux ou des dépenses ordinaires de dettes. Ce délai est de trois ans, hormis pour les dotations liquidées lors des années 2026 et 2027 pour lesquelles le délai est ramené à deux ans. A défaut, le Gouvernement pourra décider de réduire la dotation de l'année suivante à cette commune en question à concurrence du montant qu’elle n’a pas liquidé.
Une disposition équivalente concernant le contrôle a posteriori de la Région n’existe pas pour la Dotation Grandes Villes.
Notons toutefois que cette simplification administrative de taille ne signifie pas pour autant que l’administration régionale ne sera plus aux côtés des communes pour les accompagner et les conseiller dans la réalisation de leur projet d’investissement. C’est plutôt le contraire puisque le Gouvernement s’est engagé à étendre les missions d’accompagnement de l’administration régionale à l'élaboration et à la mise en œuvre de tout projet d'investissement communal et non plus seulement à ceux financés par la Région, comme c'était le cas jusqu’ici.
Le décret-programme prévoit en outre l’abrogation pure et simple des dispositions relatives au FRIC et à la PGV et au FRIC mais aussi au Plan d'investissement mobilité active communal et intermodalité (PIMACI). Les reliquats de subventions qui étaient liés à ces trois dispositifs seront versés aux communes avant le 31 décembre 2025 et les anciennes programmations d’investissement qui y sont liées seront clôturées. On notera que cette clôture n’est pas conditionnée à la production de pièces justificatives complémentaires sur les anciennes programmations ou à des contrôles techniques analogues à ceux pratiqués jusqu’ici. Les communes n'ont donc rien à faire à cet égard.
Dotations complémentaires et dotations pour missions spécifiques
Des dotations complémentaires ainsi que des dotations pour missions spécifiques pourront venir compléter le tandem FERI-Dotation Grandes Villes afin de permettre à la Région wallonne d'octroyer une aide supplémentaire sur base de critères propres à la dotation en question ou d'orienter les investissements communaux en fonction de ses priorités.
Les dotations complémentaires resteront libres d'affectation. Pour instituer une telle dotation, le gouvernement devra adopter un arrêté fixant les critères de répartition de la dotation complémentaire, son montant global, sa période d’octroi et indiquant si la dotation doit être inscrite au service ordinaire ou extraordinaire. Cet arrêté devra être confirmé par décret dans l’année qui suit son entrée en vigueur.
Dans le cas des dotations pour missions spécifiques, la procédure à suivre est identique à ceci près que l’arrêté du Gouvernement devra préciser dans son arrêté la mission à remplir. S’agissant ici d’une dotation affectée, cela signifie qu’elle devra être utilisée par les communes pour financer des dépenses bien spécifiques. Enfin, ce type de dotations pourra s’adresser ou non aux communes germanophones en fonction de la nature de la mission. Elles sont donc susceptibles de différer sur ce point des dotations complémentaires qui ne peuvent en aucun cas concerner les communes germanophones.
Appels à projets
En ce qui concerne les appels à projets, le décret-programme définit non seulement ce qu’on entend par appel à projet mais instaure également une structure commune minimale obligatoire à laquelle devra répondre tout appel à projet avant son lancement.
Les dates de fin d’appel à manifestation seront désormais limitées à quatre jours sur l’année, à savoir le 1er mars, le 1er juin, le 1er septembre et le 1er décembre. Le Gouvernement sera ensuite tenu d’arrêter dans les 90 jours la liste des bénéficiaires retenus. La subvention accordée sera intégralement versée aux bénéficiaires soit entre le 1er mars et 30 avril, soit entre le 1er septembre et le 30 octobre de l’année de répartition.
[1] Commission des Pouvoirs locaux du 9 décembre 2025.
Politique de la Ville : Alexandre Ponchaut
Voirie/travaux : Frédérique Witters - Marie-Sophie Burton - Emmanuelle Jouniaux


