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Mis en ligne le 17 Mai 2023

A titre liminaire, il importe de préciser que l’AGW Terres définit une « installation autorisée » comme « l'installation de stockage temporaire, de tri-regroupement, de prétraitement et/ou de traitement de terres, autorisée conformément au décret du 11 mars 1999 relatif au permis d'environnement, au décret du 27 juin 1996 relatif aux déchets ou à toute législation équivalente d'une autre région ou d'un autre pays ».

Les opérations réalisées par ces installations autorisées sont donc les suivantes : le stockage temporaire, le tri-regroupement, le prétraitement et le traitement des terres.

L’élimination des terres en centre d’enfouissement technique (ci-après « CET ») n’est pas visée par la définition d’ « installation autorisée » reprise par l’AGW Terres. L’AGW Terres soumet, cependant, les terres destinées à un CET également à l’obligation de traçabilité.

1. Comment qualifier une installation autorisée active dans la gestion des terres au regard du plan de secteur ?

En ce qui concerne la qualification d’un projet au regard du plan de secteur, le Conseil d’Etat rappelle que « la conformité d'un projet à l'affectation prévue au plan de secteur est une condition nécessaire d'une autorisation non dérogatoire; que l'examen de cette condition requiert notamment une qualification du projet au regard des disposition du Code qui règlent les conditions de l'utilisation de la zone; que cette opération de qualification est soumise au contrôle complet de la légalité par le Conseil d'Etat; que, si le projet est admissible dans la zone, l'autorité compétente doit en outre apprécier s'il est conforme au bon aménagement des lieux; qu'elle exerce dans ce cas une compétence discrétionnaire; que sur l'exercice de ce pouvoir d'appréciation, le Conseil d'Etat n'exerce que le contrôle limité de l'erreur manifeste d'appréciation ».[1]

A cet égard, le Conseil d’Etat a déjà considéré, pour une installation de regroupement et de tri de déchets inertes, que « Il ressort de l'usage des mots "en ce compris" à l'alinéa 1er de l'article 30bis que les activités à caractère industriel qui y sont citées ne le sont pas à titre limitatif, mais bien exemplatif. Il a été précisé, au cours des travaux préparatoires de la disposition modifiée par le décret du 30 avril 2009 modifiant le Code wallon de l'aménagement du territoire, de l'urbanisme et du patrimoine, le décret du 11 mars 1999 relatif au permis d'environnement et le décret du 11 mars 2004 relatif aux infrastructures d'accueil des activités économiques, que les activités industrielles peuvent "comprendre également des activités de gestion des déchets" (Projet de décret modifiant le Code wallon de l'aménagement du territoire, de l'urbanisme et du patrimoine, le décret du 11 mars 1999 relatif au permis d'environnement et le décret du 11 mars 2004 relatif aux infrastructures d'accueil des activités économique, Commentaire des articles, Doc. parl., Parl. wall., session 2008-2009, no 972/1 et 972/1bis, p. 11). Il se déduit de l'économie de l'article 30bis que la gestion de déchets, permise en vertu de l'alinéa 1er, doit être distinguée du dépôt de déchets, admis seulement dans des conditions exceptionnelles. (…) Une telle activité relève bien de la notion d'activité à caractère industriel telle que visée à l'article 30bis, alinéa 1er, précité, laquelle peut viser des activités de gestion des déchets.»[2]

Si les mots « en ce compris » ont été supprimés de l’article D.II.30 du CoDT, il nous semble que les activités liées à la gestion des déchets peuvent néanmoins toujours être considérées comme consistant en une activité à caractère industriel, à l’exclusion du dépôt de déchets.

Ce point de vue est rejoint par la doctrine qui indique que « La zone d’activité économique industrielle est d’abord destinée aux activités « à caractère industriel » limitativement énumérées à l’alinéa 1er de l’article D.II.30. Il s’agit des activités « liées à un processus de transformation de matières premières ou semi-finies », mais aussi celles « de conditionnement, de stockage, de logistique ou de distribution ». Dans la mesure où le législateur ne définit pas ces activités, il faut s’en remettre au sens courant. C’est ainsi que : – la « transformation de matières premières ou semi-finies » désigne tout procédé par lequel on modifie la nature, la composition ou la forme de matières premières ou semi-finies afin d’obtenir des produits nouveaux. Les matières premières sont a priori des « matière(s) non transformée(s) par le travail ou par la machine, par opposition aux produits manufacturés », mais la notion paraît susceptible d’englober les déchets, à tout le moins en tant qu’ils sont valorisables et constituent dès lors des « matières premières secondaires ». L’incinération de déchets semble en revanche exclue, de même que le dépôt de déchets. »[3]

Par ailleurs, l’annexe 3 du Décret du 1er mars 2018 relatif à la gestion et à l’assainissement des sols (ci-après « Décret Sols ») considère que lorsque l’usage de fait d’un terrain vise l’exploitation d’un centre de tri, de (pré)traitement, de regroupement des déchets, d’un CET ou le dépôt de matériaux de construction, ce terrain est réputé avoir un type d’usage V, soit un type industriel.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, il convient donc de distinguer :

  • Le dépôt de terres. A cet égard, le simple stockage temporaire de déchets et le regroupement sans tri peuvent être considérés comme étant du dépôt de déchet, lequel est expressément autorisé pour une durée limitée dans les zones d’activité économique industrielle et dans les zones de dépendances d’extraction (articles D.II.30, alinéa 3, 1°  et D.II.33 du CoDT – voy. infra)[4]
  • L'incinération et l’enfouissement des terres. Les CET sont expressément autorisés au sein des zones de services publics et d’équipements communautaires marquée de la surimpression « C.E.T. » (article D.II.26, §2 du CoDT – voy. infra) ;
  • Le tri, le prétraitement et le traitement des terres qui consistent en des activités à caractère industriel. 

Attention : En ce qui concerne la notion de « petite industrie », si l’industrie fait référence à toute entreprise mettant en œuvre des matières premières, seule la « petite industrie » est admissible en zone d’habitat, en zone d’habitat à caractère rural, en zone d’activité économique mixte et en zone d’enjeu communal, ce qui implique de la distinguer des autres activités industrielles. Il convient à cet égard de s’en référer au sens usuel, selon lequel une petite, moyenne ou grande industrie se distingue selon l’importance de la production et des moyens mis en œuvre. Le niveau de nuisance généré et les dimensions des installations doivent également être pris en compte, étant entendu cependant qu’ils doivent faire l’objet d’une appréciation objective, indépendante de leur impact potentiel concret sur le voisinage. Au regard de ces considérations, le Conseil d’Etat a déjà considéré que ne relève pas de la notion de petite industrie une installation de regroupement et de dépôt temporaire de déchets inertes et non dangereux de construction, qui s’étend sur 70 ares et dont les nuisances sont nombreuses.[5]

Dans un arrêt plus récent, le Conseil d’Etat précise, dans l’hypothèse de l’extension d’une activité déjà existante, que « Pour déterminer si l’activité relève de la petite industrie, l’examen ne peut pas porter seulement sur l’ampleur de l’extension, si tel est le cas, mais bien sur l’ampleur de l’entreprise totale après l’extension envisagée. (…) Devant examiner l’ensemble de la situation telle qu’elle se présente au moment où l’autorité statue sur la demande de permis unique, il incombe donc, en principe, à celle-ci de vérifier si cette activité dans sa globalité relève encore ou non de la petite industrie, en ayant égard non seulement aux extensions ou modifications intervenues après les permis d’urbanisme devenus définitifs et aux extensions ou modifications projetées mais aussi aux installations existantes précédemment autorisées dans le cadre de la police de l’environnement ou des dépôts de déchets.»[6]

En conclusion, à notre sens, l’installation autorisée pourrait donc être qualifiée comme :
  • Un dépôt de déchet si l’installation autorisée réalise du simple stockage temporaire ou du regroupement sans tri et sans prétraitement de terres ;
  • Une activité à caractère industriel si l’installation autorisée réalise du tri, du prétraitement ou du traitement de terres. Dans pareille hypothèse, l’installation autorisée pourra être qualifiée de « petite industrie », selon l’importance de la production et des moyens mis en œuvre, ainsi qu’eu égard aux dimensions des installations et aux nuisances générées par les activités projetées.

Nous recommandons, en tout état de cause, lors de la conception du projet, de prendre contact avec l’autorité compétente afin d’avoir sa position sur le sujet.

 

2. Dans quelles zones peuvent s’inscrire les installations autorisées actives dans la gestion des terres si les conditions requises sont remplies?

  • La zone d’habitat, la zone d’habitat à caractère rural, la zone d’activité économique mixte et la zone d’enjeu communal pour la petite industrie. 
  • La zone d’activité économique industrielle telle que définie à l’article D.II.30 du CoDT qui prévoit que:

« La zone d’activité économique industrielle est destinée aux activités à caractère industriel liées à un processus de transformation de matières premières ou semi-finies, de conditionnement, de stockage, de logistique ou de distribution. Elles peuvent s’exercer sur plusieurs sites d’activité. 

 Y sont admises les entreprises de services qui leur sont auxiliaires ainsi que les activités économiques qui ne sont pas à caractère industriel et qui doivent être isolées pour des raisons d’intégration urbanistique, de mobilité, de sécurité ou de protection environnementale. La vente au détail y est exclue sauf lorsqu’elle constitue l’accessoire d’une activité économique visée aux alinéas 1er et 2. 

Peuvent être autorisés pour une durée limitée :

1° dans les zones d’activité économique industrielle, les dépôts de déchets inertes ;

2° dans les zones d’activité économique industrielle situées le long des voies d’eau navigables, les dépôts de boue de dragage. »

  • La zone de dépendances d’extraction telle que définie à l’article D.II.33 du CoDT qui prévoit expressément que « Le regroupement de déchets inertes pour une durée limitée ou la valorisation de terres et cailloux peut y être autorisé aux conditions et selon la procédure déterminée par le Gouvernement. ». L’exposé des motifs du CoDT précise qu’ « Il s’agit de rendre admissible le remblayage de certains trous de carrières existantes qui sont pauvres en termes écologiques voire de permettre le stockage temporaire de déchets inertes dans l’attente d’un autre exutoire."
  • Précisons, pour information, que l’article D.II.26, §2 du CoDT dispose que : « La zone de services publics et d’équipements communautaires marquée de la surimpression « C.E.T. » est principalement destinée à accueillir l’implantation et l’exploitation d’un centre d’enfouissement technique visées par la législation relative aux déchets ainsi que les installations de regroupement de déchets préalables à cette exploitation. Elle peut, en outre, être destinée à d’autres activités de gestion de déchets pour autant que ces activités soient liées à l’exploitation du centre d’enfouissement technique autorisé ou n’en compromettent pas l’exploitation. Au terme de l’exploitation du centre d’enfouissement technique, le périmètre couvert par celui-ci devient une zone d’espaces verts et sa réhabilitation, en tout ou en partie, est fixée par le permis délivré pour l’exploitation de l’installation concernée."

3. Que faire en cas de contradiction avec le plan de secteur ?

Dans un premier temps, il convient de préciser que l’article D.IV.13 du CoDT prévoit que :

« Un permis ou un certificat d’urbanisme n°2 peut être octroyé en dérogation au plan de secteur ou aux normes du guide régional d’urbanisme si les dérogations : 

1° sont justifiées compte tenu des spécificités du projet au regard du lieu précis où celui-ci est envisagé ;

2° ne compromettent pas la mise en œuvre cohérente du plan de secteur ou des normes du guide régional d’urbanisme dans le reste de son champ d’application ;

3° concernent un projet qui contribue à la protection, à la gestion ou à l’aménagement des paysages bâtis ou non bâtis. »

Précisons, par ailleurs, que si l’installation autorisée projetée résulte d’une initiative communale, l’article D.IV.11 du CoDT indique que le permis peut être accordé en dérogeant au plan de secteur.

Si une telle dérogation ne peut être envisagée, l’implantation du projet devra être modifiée.

Attention : Comme indiqué plus haut, l’annexe 3 du Décret Sols considère que lorsque l’usage de fait d’un terrain vise l’exploitation d’un centre de tri, de (pré)traitement, de regroupement des déchets, d’un CET ou le dépôt de matériaux de construction, ce terrain est réputé avoir un type d’usage V, soit un type industriel. Dès lors, si une activité de gestion de déchets est implantée sur un site qui n’a pas pour vocation un usage économique à caractère industriel, des mesures environnementales préventives seront imposées afin de garantir l’absence de contamination du sol et des eaux souterraines. (Exemple : surface étanche avec récupération des eaux de ruissellement et traitement des eaux usées avant rejet).

 


[1] CE, n°208.428, 26 octobre 2010, SCHILANSKY.

[2] CE, n°241.122 du 27 mars 2018, Ville de Mons.

[3] CHARLIER, S., PIRSON, A., « Art. D.II.22-D.II.42 CoDT - Plans de secteur. Contenu. Destination et prescriptions générales des zones », in BORN, C. (ED.), LAGASSE, D. (ED.), NEURAY, J. (ED.), PAQUES, M. (ED.), Code du développement territorial (CoDT) commenté, 2020, 212-339 (128 p.).

[4] A notre sens, ne sont pas visés ici les stockages temporaires de terres sur chantier en ce que ces derniers ne sont pas visés par l’article D.IV.4, 9° et 15°, a) du CoDT. En effet, ce stockage étant limité à la durée du chantier, il n’entraine pas, selon nous, une modification sensible du relief du sol. Par ailleurs, l’utilisation du site du chantier pour y stocker des terres ne se fait pas de manière « habituelle » : « Il n’est pas requis que l’utilisation d’un terrain soit permanente, mais simplement habituelle. Ainsi, « la régularité et la récurrence des dépôts permettront d’établir si un permis est ou non requis ». » (GEORGE G., « Le permis d’urbanisme », Rép. Not., T. XIV, Droit public et administratif, Livre XIV/1, L’urbanisme. La Région wallonne, Larcier, 2020, p. 472). Pour plus d’informations sur le stockage temporaire de terres sur chantier : https://www.uvcw.be/environnement/vos-questions/art-7816.  

[5] C.E., 23 novembre 2017, n° 239.956, Pirson.

[6] C.E., 20 décembre 2021, n° 252.484, Ville de Charleroi.

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Date de mise en ligne
17 Mai 2023

Type de contenu

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Matière(s)

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