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Mis en ligne le 20 Avril 2022

Avec la crise sanitaire notamment, nombreuses sont les entreprises en difficulté de paiement. Si certaines atterrissent sur la case « faillite », d’autres passent par celle de la procédure de réorganisation judiciaire (ou PRJ). Cette procédure vise à assurer la continuité de l’entreprise en difficulté en préservant ses actifs et/ou ses activités et en lui accordant, par protection judiciaire, un temps de pause.

La PRJ est régie par le livre XX « Insolvabilité des entreprises » au sein du Code de droit économique. Elle aboutit à trois possibilités : une réorganisation par accord amiable, une réorganisation par accord collectif ou la réorganisation par transfert sous autorité de justice.

Parmi les dettes de l’entreprise en difficulté se trouvent très souvent des dettes envers l’ONSS et/ou le SPF Finances. L’un des avantages de cette procédure est de « geler » provisoirement le recouvrement des dettes de l’entreprise en difficulté. Ces dettes sont alors qualifiées de « sursitaires » parce qu’« en sursis ».

Si la PRJ pouvait, moyennant motivation adéquate[1], amener un pouvoir adjudicateur à exclure l’entreprise en difficulté[2], la question ici laissée en suspens porte sur un autre motif d’exclusion – obligatoire : l’existence de dettes sociales et/ou fiscales prises en compte au sein de cette PRJ peut-elle aboutir à une exclusion au sens de l’article 68 de la LMP ?

Pour répondre à cette question, l’on se rappellera utilement que la réglementation relative aux marchés publics impose (dans une grande majorité des marchés publics), une vérification de l’absence de dettes sociales et/ou fiscales et une exclusion des opérateurs économiques qui présenteraient des dettes sociales et/ou fiscales, sans préjudice des exceptions[3]. Cela étant, ce n’est pas la réglementation relative aux marchés publics qui définit ce qu’il faut entendre par « obligations relatives au paiement d'impôts et taxes ou de cotisations de sécurité sociale ».

L’article XX.53 du Code de droit économique prévoit : « Les créances sursitaires ne sont pas prises en considération dans la réglementation sur les marchés publics pour établir si le débiteur respecte ou non les modalités de remboursement des créances concernées. L'Office National de la Sécurité Sociale ou l'administration des impôts ne font pas mention de ces créances dans les attestations qu'ils délivrent ». Or, lors de la vérification via Télémarc, il arrive que ces dettes sursitaires apparaissent bien, ce qui contraint les pouvoirs adjudicateurs à examiner l’éventuelle application des exceptions et à interroger tant les soumissionnaires concernés que l’ONSS et/ou le SPF Finances. Dès lors, comment concilier les deux réglementations ?

Après interrogation de notre part, la question a été soumise à la Commission fédérale des marchés publics. Si l’article XX.53 du Code de droit économique était bien pris en compte dans la délivrance d’attestations via Télémarc par l’ONSS, ça ne l’était pas par le SPF Finances. Cela le sera toutefois à l’avenir, pour se conformer à ladite disposition.

Par ailleurs, concernant la publication au Moniteur belge du jugement d’admissibilité en PRJ, le secrétariat de la Commission fédérale des marchés publics a constaté un décalage de trois à dix jours à dater du prononcé du jugement tandis qu’il a constaté une adaptation rapide des informations reprises à la BCE.

En conclusion, il est exact d’affirmer que les dettes sociales et/ou fiscales qui sont admises en PRJ ne devraient pas apparaitre lors de la vérification Télémarc. En pratique, toutefois, elles peuvent apparaître. En pareil cas, la réglementation relative aux marchés publics contraint le pouvoir adjudicateur à interroger l’opérateur économique concerné et permet d’interroger l’ONSS et/ou le SPF Finances, ce qui est recommandé. C’est à l’occasion de ces interrogations que le pouvoir adjudicateur devrait apprendre le caractère sursitaire de ces dettes, qui n’auraient pas dû apparaitre lors de la vérification sur Télémarc.

Si l’on comprend bien la volonté de préserver la (sur)vie des entreprises en difficulté, le pouvoir adjudicateur demeurera inquiet de ce que, si elles remportent le marché, elles s’exécutent correctement, sans contrarier la continuité des services publics, ni l’intérêt public, ni les impératifs liés par exemple à l’obtention de subsides par le pouvoir adjudicateur. Le pouvoir adjudicateur sera logiquement vigilant à la mise en œuvre ou non des prérogatives dont jouissent ces entreprises en difficulté du fait de cette PRJ[4] et au risque accru de faillite, mettant à mal l’exécution du marché.

 


[1] Voyez en ce sens : C.E., 29.6.2017, n° 238.735.
[2] Art. 69, 2° de la loi du 17.6.2016 relative aux marchés publics, M.B., 14.7.2016, ci-après LMP.
[3] Art. 68 de la LMP.
[4] Notamment : la possibilité de suspension de l’exécution du marché : art. XX.56 du Code de droit économique.

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Date de mise en ligne
20 Avril 2022

Type de contenu

Q/R

Matière(s)

Marchés publics
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