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Mis en ligne le 11 Janvier 2007

En exécution de la Convention sectorielle 2003-2004 ayant fait l'objet d'un protocole d'accord le 21 février 2006, le Gouvernement wallon a décidé de mettre sur pied une Commission "Statut" chargée d'objectiver les raisons de la diminution de l'emploi statutaire au profit du recours au contrat de travail [1] et de proposer des pistes d'améliorations législatives et/ou réglementaires susceptibles de corriger cette évolution.

La réunion d'installation de cette commission, à laquelle participe l'Union des Villes et Communes de Wallonie, a eu lieu le 22 mars 2006.

A ce stade de la réflexion, il nous a semblé important de faire le point sur les raisons qui peuvent être à l'origine de la diminution du nombre des agents nommés au sein des pouvoirs locaux. Tel est l'objet de cette note qui fut approuvée par le Conseil d'administration de notre association en sa séance du 7 juin 2006 et adressée au Ministre des Affaires intérieures et de la Fonction publique le 14 juin 2006.

Prolégomènes: examen de la sphère de l'autonomie locale dans le choix dont elle dispose entre l'engagement statutaire et l'engagement contractuel

Sur le plan de la légalité

En vertu du principe de l'autonomie communale, porté par les articles 41 et 162 de la Constitution et répercuté dans l'article L1122-30 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, l'autorité communale peut procéder à des engagements statutaires ou contractuels.

Si une consécration implicite de la relation statutaire semble se faire jour à la lecture des articles L1212-1 et L1213-1 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, on ne peut en déduire une exclusion de la possibilité d'un engagement contractuel dès lors que le texte même du code l'évoque, en l'admettant donc, en son article L1215-1 et que la réalité de l'engagement contractuel est également prise en compte par l'article 144bis de la nouvelle loi communale.

Si, certes, différentes circulaires ont affirmé le principe de la primauté du statut dans le secteur public local wallon, il n'appartient pas à l'autorité de tutelle de restreindre par cette voie les cas dans lesquels il peut être recouru au contrat de travail [2].

L'enseignement de la jurisprudence

Face à l'absence de texte explicite se prononçant en faveur de l'un ou l'autre type d'engagement au sein des pouvoirs locaux, le Conseil d'Etat, relayé par les autres juridictions, a privilégié le mode d'engagement statutaire dans sa jurisprudence.

Le point de départ de cette position vient d'une interprétation de la volonté du législateur du début du 20ème siècle qui, par une loi du 30 juillet 1903, entendait assurer une certaine stabilité aux emplois communaux en mettant en place un régime de tutelle et de recours administratifs [3].

Ce faisant, la jurisprudence du Conseil d'Etat - qui reconnaît la validité de l'engagement contractuel [4] en se basant sur l'article 1er de la loi du 3 juillet 1978 sur les contrats de travail [5] - a tenté de cerner les limites de l'engagement contractuel [6]. Ainsi, la Haute Juridiction administrative considère notamment que l'engagement contractuel doit être constaté de manière non équivoque. En cas de doute sur le lien unissant un agent à la commune, il sera considéré que l'engagement qui est intervenu est un engagement statutaire [7]. Il est donc conseillé, à chaque hypothèse d'engagement contractuel, que celui-ci soit constaté par écrit.

Au sein des CPAS, par contre, l'optique est différente: la loi organique, en ses articles 55, 55bis et 56, prévoit spécifiquement les cas dans lesquels il peut être recouru à l'engagement contractuel.

Pistes de réflexion thématiques

Congés de maladie

Comparaison des modes d'indemnisation des agents statutaires et contractuels

- Si un agent statutaire tombe malade, il reste à la charge complète de l’employeur. Dans un premier temps, l’agent reçoit l’entièreté de son traitement; lorsqu’il a épuisé son quota de jours de congé de maladie (qui lui est attribué en vertu des règles arrêtées par le statut communal), il tombe dans la position de disponibilité et reçoit un traitement d'attente qui équivaut à 60 % de son traitement (sauf cas de maladie grave et de longue durée reconnue par le Service de Santé administratif: dans ce cas, le traitement d'attente équivaut à 100 % du dernier traitement d'activité).

Un agent contractuel, par contre, ne conserve le droit au traitement que pendant la période dite "de salaire garanti" (30 premiers jours à 100 % pour les employés, 7 premiers jours à 100 % puis 7 jours suivants à 60 % de la rémunération plafonnée pour les ouvriers). Passé cette période, il bénéficiera d'allocations de l'assurance maladie-invalidité.

Cette différence de traitement entre statutaires et contractuels trouve son origine dans le fait que les agents définitifs ne cotisent que partiellement aux secteurs de la sécurité sociale (s'ils cotisent au secteur des soins de santé, ils ne cotisent pas au secteur des indemnités, ni au secteur de l'assurance chômage).

Le coût de la maladie d'un agent statutaire peut donc être ressenti de différentes façons:
- double coût salarial (maintien de la rémunération de l'agent malade et paiement éventuel d'un second traitement, pour pallier l'absence de l'agent statutaire);
- coût salarial + coût "administratif" ou opérationnel (maintien de la rémunération et retard accumulé dans le travail à réaliser si l'employé ou l'ouvrier statutaire n'est pas remplacé).

- Un autre élément qui rend le coût des absences des agents statutaires plus important que celui relatif aux absences de contractuels est l'octroi d'un mi-temps médical. Le "mi-temps médical", ou la possibilité de reprendre le travail sur base de prestations réduites suite à une maladie tout en maintenant son droit à une rémunération complète, est repris par un grand nombre de pouvoirs locaux, qui se sont calqués sur le régime applicable aux agents de l'Etat (et ne vise donc que les agents statutaires). Outre le fait que l'agent qui reprend ses fonctions ne les reprend, par définition, qu'à mi-temps, rappelons que le congé octroyé sur cette base l'est indépendamment des jours de congés de maladie et, par conséquent, n'intervient pas dans le décompte de ces jours de maladie (pas de diminution du quota de jours de maladie, et donc maintien pendant plus longtemps du traitement complet). Le congé pour prestations réduites est assimilé à une période d'activité de service et est rémunéré à 100 %. Signalons également que dans le régime applicable aux agents de l'Etat, le mi-temps médical peut être accordé sans limite de temps (contrairement à l'ancien régime porté par l'A.R. 1.6.1964 qui prévoyait un maximum de nonante jours par dix ans d'ancienneté de service).

 Pistes de solution:

- extension des prestations de sécurité sociale (secteur indemnité) aux agents statutaires (cela entraînerait cependant une augmentation du coût du statutaire puisque le secteur indemnités est notamment financé par les cotisations patronales);
- adaptation du régime du mi-temps médical:
. fixation d'une limite maximale (retour au régime de l'A.R. de 1964);
. ou prise en compte du mi-temps non presté dans le nombre de congés de maladie pris sur une année;
- octroi d'une subvention régionale couvrant un certain pourcentage d'absentéisme, pour permettre d'engager du personnel en remplacement.

Remarque:

On peut toutefois se poser la question de savoir dans quelle mesure le surcoût dû aux absences des agents définitifs évoqué ci-dessus n'est pas contrebalancé par le fait que les statutaires sont moins chers pour l'employeur en termes de cotisations sociales (hors cotisations pension).

Le quota de jours de maladie: une spécificité du secteur public

L'agent statutaire qu'une maladie ou une infirmité empêche d'exercer normalement sa fonction peut prétendre, pour la durée entière de sa carrière, à un congé de maladie de 21 jours ouvrables par 12 mois d'ancienneté de service.

Ces jours de congé, s'ils ne sont pas utilisés, constituent une réserve de jours de congé de maladie dans laquelle pourra puiser l'agent concerné pour maintenir son droit au traitement. Ce n'est que quand ce quota est épuisé que l'agent dont question sera mis en disponibilité et verra son traitement réduit: on parlera dans ce cas de traitement d'attente. Comme évoqué ci-dessus, ce traitement ne sera pas réduit si le Service de Santé administratif (SSA) estime que l'affection dont souffre l'agent peut être considérée comme une maladie grave et de longue durée.

Le système ici décrit consiste donc en quelque sorte en un salaire garanti à géométrie variable, en fonction de l'ancienneté et de la nature de la maladie. Ce quota de jours de maladie n'est pas un droit de prendre des jours d'absence, mais constitue une assurance du maintien pendant une plus longue période de l'entièreté du traitement.

La réglementation en vigueur, assurant le maintien de l'entièreté de son traitement à l'agent en congé de maladie pendant ce qui peut s'avérer être une période relativement longue, ne présente aucun aspect incitatif à la reprise du travail tant que le quota de jours de congé de maladie n'est pas atteint.

En outre, la réglementation décrite aboutit, dans certains cas, à ce que l'agent qui s'est constitué une réserve de jours de congé de maladie vienne à considérer ce quota de jours comme des jours de congé disponibles avant la retraite.

Face à ce genre d'attitude, il est important que l'autorité locale mette en œuvre les moyens dont elle s'est légalement dotée: application du statut administratif et du règlement de travail en matière d'absence pour maladie (contrôle par le médecin du travail, pas de droit au traitement en cas d'absence injustifiée, sanction disciplinaire, outils GRH pour la motivation du personnel, etc.).

Une seule limite au quota de jours de maladie existe dans la réglementation en vigueur: en vertu de l'article 82, par. 3, de la loi du 5 août 1978, l'agent quia atteint l'âge de 60 ans est mis d'office à la retraite le premier jour du mois qui suit celui au cours duquel, sans avoir été reconnu définitivement inapte, il compte, depuis son soixantième anniversaire, soit par congé, soit par disponibilité, soit par l'un et par l'autre, 365 jours d'absence pour cause de maladie ou 548 jours, s'il s'agit d'un invalide de guerre.

Dans le cadre de cet article 82, par. 3, le calcul du nombre de jours de maladie ne prend en compte que les jours de maladie postérieurs au soixantième anniversaire de l'agent.

Il résulte de ce qui précède que, à moins d'être reconnu définitivement inapte par le service médical, l'agent ne pourra être mis d'office à la pension dès l'âge de 60 ans: il faudra pour cela attendre qu'il ait accumulé 365 jours de maladie ou de disponibilité.

Si, par contre, l'agent qui a atteint l'âge de 60 ans est déclaré définitivement inapte par le SSA, il sera mis à la pension d'office pour inaptitude physique dès le moment où il aura épuisé son quota de jours de maladie et au plus tard au premier jour du mois qui suit celui au cours duquel il atteint un nombre de 365 jours de congé de maladie postérieurs à l'âge de 60 ans (ou 548 jours pour les invalides de guerre).

La différence entre le cas de l'agent malade de 60 ans qui n'a pas été déclaré inapte et celui de 60 ans qui est déclaré inapte est que dans le premier cas, il faudra, le cas échéant, passer par une période de mise en disponibilité (ce qui oblige donc l'employeur à octroyer un traitement d'attente de 60 ou 100 %, cf. supra); dans le second cas, dès que le quota est atteint, il y a mise à la retraite d'office. On notera cependant que, dans les faits, la procédure de déclaration d'inaptitude auprès du SSA est loin d'être efficace: l'agent qui ne se rend pas à une première convocation n'est, la plupart du temps, convoqué une nouvelle fois que des mois plus tard, ce qui augmente d'autant la période pendant laquelle il reste à charge de l'employeur local.

Pistes de solution:

- assouplissement du régime de quota de jours de maladie augmentant en fonction de l'ancienneté (par ex. en prévoyant la fixation d'un quota maximum);
- assouplissement de la procédure auprès du SSA;
- permettre la mise à la pension d'office à partir de 60 ans que l'agent ait été ou non déclaré inapte dès que le quota est atteint, sans attendre que 365 jours de congé de maladie ou de disponibilité soient accumulés (la déclaration d'inaptitude par le SSA conservant une raison d'être pour les agents qui n'ont pas atteint l'âge de 60 ans).

Evaluation et (in)aptitude professionnelle

La circulaire du 27 mai 1994 relative aux principes généraux de la fonction publique locale

En 1994, la négociation sur la révision générale des barèmes (RGB) s'est transformée en circulaire contenant les principes généraux de la fonction publique locale. A côté de la révision des barèmes, quelques dispositions relatives au statut ont été adoptées, sans que celles-ci ne présentent un caractère complet.

Ainsi, en ce qui concerne l'évaluation, la circulaire ne traite que de la procédure et du modèle de fiche d'évaluation. L'évaluation a été insérée dans la circulaire dans le but de la rapporter à l'évolution de carrière (pour rappel, pour obtenir une évolution de carrière accélérée, l'agent doit remplir deux conditions: disposer d'une évaluation au moins positive et avoir suivi les formations requises).

En d'autres mots, on ne trouve dans la circulaire ni la définition, ni les objectifs, ni les moyens et conditions, ni l'ensemble des conséquences de l'évaluation.

On n'y trouvera pas que l'évaluation a pour objet de déterminer les aptitudes professionnelles des agents et on n'y trouvera pas trace de la nécessité d'évaluer par rapport à des objectifs prédéfinis et donc la nécessité de disposer de profils de compétences et de descriptions de fonctions.

On n'y trouve pas non plus la possibilité, pour l'agent qui s'est vu infliger consécutivement deux fois l'évaluation la plus négative, de faire l'objet d'une déclaration d'inaptitude professionnelle, comme le prévoit l'article 24 de l'arrêté royal du 22 décembre 2000 fixant les principes généraux du statut administratif et pécuniaire des agents de l'Etat (ARPG) [8], ainsi que le Code de la fonction publique wallonne (CFPW) [9].

Le modèle de statut du personnel communal, établi par l'Union

Devant une circulaire qui, à l'évidence, ne contenait que des bribes de principes généraux et vu la nécessité pour les communes d'adapter leurs statuts, l'Union des Villes et Communes de Wallonie a rédigé, pour rencontrer les besoins de ses membres, un modèle de statuts administratif et pécuniaire du personnel communal.

Dans la foulée de l'ARPG, notre modèle de statut du personnel communal a tout naturellement prévu la possibilité d'un licenciement pour inaptitude professionnelle après deux évaluations réservées.

On trouvera ci-après une comparaison entres les régimes applicables dans le modèle de statut de l'Union, dans le CFPW et dans l'ARPG.

Evaluation

Modèle Union

CFPW

ARPG

 

But

 

- Assurer la qualité du service public;
- permettre aux agents de satisfaire aux conditions d'évolution de carrière et de promotion.

 

- Apprécier la contribution de l'agent au bon fonctionnement du service, en fonction de son métier et des tâches qui lui sont confiées.

 

 

Règles et critères d'évaluation

 

- A lieu tous les 2 ans;
- mentions "très positive", "positive" ou "réservée";
- après une évaluation "réservée", une évaluation intermédiaire a lieu au bout de 1 an.

 

- A lieu tous les 2 ans;
- mentions "favorable", "réservée", ou "défavorable";
- après une évaluation "réservée" ou "défavorable" une évaluation intermédiaire a lieu au bout de 6 mois.

 

- Renvoi au statut applicable.

 

Recours sur évaluation

 

- Si réclamation: commission d'évaluation (non paritaire, les organisations syndicales n'ayant pas de voix délibérative);
- audition et avis de la commission;
- le collège des bourgmestre et échevins tranche.

 

- Si évaluation "réservée" ou "défavorable", l'agent peut saisir la Chambre de recours (paritaire, + 1 président et 3 vices-présidents magistrats);
- la Chambre rend un avis;
- le Comité de direction tranche.

 

- Le statut doit prévoir un recours possible auprès d'une commission paritaire (+ président);
- la commission doit avoir une compétence "au moins d'avis".

 

Procédure d'inaptitude professionnelle

 

- A l'initiative du secrétaire communal;
- le collège des bourgmestre et échevins peut formuler une proposition d'inaptitude professionnelle après deux évaluations successives "réservées" (impossible si une mention "réservée" a été attribuée par le collège des bourgmestre et échevins nonobstant un projet contraire des supérieurs hiérarchiques ou une proposition contraire de la commission).

 

- Après 2 évaluations défavorables successives, le secrétaire général notifie automatiquement à l'agent la proposition de licenciement pour inaptitude professionnelle.

 

- Renvoi au statut applicable.

 

Recours sur l'inaptitude professionnelle

 

- Commission d'évaluation, non paritaire, compétence d'avis.

 

- Chambre de recours (paritaire, compétence d'avis).

 

- Renvoi au statut qui doit prévoir un recours possible auprès d'une commission paritaire (+ président) ayant une compétence au moins d'avis.

 

Décision

 

- Conseil communal, après audition (procédure similaire à une procédure disciplinaire).

 

- Gouvernement.

 

- Renvoi au statut applicable.

Indemnités de licenciement

- Indemnité de 3 mois de traitement + 3 mois par période entamée de 5 ans de service.

 

- Le statut peut prévoir l'octroi d'indemnités.

On le constate, une procédure d'inaptitude professionnelle est envisagée aux différents niveaux de pouvoir.

Une telle procédure, que l'on doit distinguer d'une procédure disciplinaire (l'agent jugé inapte à l'exercice des tâches et fonctions qui lui sont assignées n'a pas forcément commis de faute qui pourrait être sanctionnée), doit pouvoir être mise en œuvre au niveau local dans le but de donner un vrai sens à l'évaluation, qui doit rester un instrument de mesure des aptitudes professionnelles des agents, mais doit également devenir un outil de responsabilisation et de motivation du personnel local afin de permettre d'assurer la continuité du service public mais aussi son changement.

Cette procédure doit donc fixer toutes les conséquences de l'évaluation: besoins en formation, accès à l'évolution de carrière accélérée et à la promotion, mais aussi inaptitude professionnelle. Sans inaptitude professionnelle à la clé, ces objectifs fondamentaux de l'évaluation que sont l'amélioration des aptitudes professionnelles et la motivation ne sauraient être atteints.

Piste de solution:

aménager la procédure d'inaptitude professionnelle prévue par notre modèle de statut en prévoyant que la Commission de recours, à l'instar de la Chambre de Recours wallonne, soit composée paritairement.

La rupture, pour faute, de la relation statutaire ou contractuelle

En qualité d'employeur d'agents contractuels, les administrations communales sont soumises à la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, qui n'impose aucune obligation de motivation en cas de licenciement, si ce n'est le cas de licenciement pour motif grave. Outre les hypothèses spécifiques de protection du travailleur, l'employeur local a le droit de rompre le contrat de travail quand il le souhaite, moyennant le respect d'un délai de préavis ou le paiement d'une indemnité compensatoire.

Même si la rupture unilatérale était jugée irrégulière (licenciement considéré comme abusif par le juge éventuellement saisi ou licenciement au mépris d'un cas de protection particulière du travailleur), jamais l'employeur ne sera contraint de réintégrer le travailleur dont il a souhaité se séparer. L'unique (mais parfois lourde) conséquence de cette irrégularité, se situera sur le plan financier.

Il en va autrement de la rupture de la relation statutaire. Celle-ci ne peut se concevoir que dans le respect d'une procédure qui, si elle se veut protectrice des droits de la défense, n'en reste pas moins lourde à mettre en œuvre et peut être l'occasion de manœuvres tendant à contourner son bon déroulement (certificats médicaux empêchant une comparution et rendant très difficile, voire impossible, une décision de rupture correctement motivée selon les critères élaborés par le Conseil d'Etat) [10].

En outre, si la rupture de la relation statutaire est considérée comme irrégulière, il y a annulation par le Conseil d'Etat d'un acte administratif désormais réputé n'avoir jamais existé. Faute de pouvoir revoir sa copie (en pouvant mieux motiver sa décision, par ex.), l'autorité locale n'aura d'autre choix que de réintégrer l'agent dont question dans ses fonctions antérieures, ce qui n'est pas une mesure neutre sur le plan des relations de travail entre l'autorité et l'agent, ou entre les agents eux-mêmes.

Pistes de solution:

- assouplir l'obligation d'audition pour éviter les manœuvres dilatoires (ce point est délicat vu la position du Conseil d'Etat: le respect du principe audi alteram partem est central dans la jurisprudence de la Haute Juridiction administrative). On pourrait peut-être envisager:
. de considérer l'audition du représentant (avocat) comme suffisante? Cela n'empêchera cependant pas les manœuvres dilatoires (il suffira que l'agent "malade" n'envoie pas son conseil à l'audition);
. de considérer qu'en présence de faits graves et précis, corroborés par différents témoins, il peut être dispensé d'entendre l'agent couvert par un certificat médical qui ne se rend pas à l'audition et qui s'abstient d'y envoyer son avocat;
- empêcher la réintégration de l'agent irrégulièrement écarté, en prévoyant un système d'indemnités.

Politique de l'emploi en Région wallonne

Une autre raison pour laquelle les autorités locales sont tentées de recourir à des engagements contractuels est l'existence de programmes de lutte contre le chômage qui rendent l'engagement contractuel financièrement plus intéressant pour l'employeur public local [11].

La situation financière d'un grand nombre de communes étant préoccupante, ne pas profiter de ces opportunités insufflées par le législateur lui-même, qu'il soit fédéral ou régional, priverait les pouvoirs locaux de moyens financiers leur permettant de mettre en œuvre leurs missions obligatoires ou de mettre sur pied des services, certes facultatifs, mais apportant une plus-value indéniable au secteur public local.

Pistes de solutions:

pour éviter que les programmes visant à résorber le chômage ne soient un frein à l'engagement de personnel statutaire, il pourrait être envisagé de:
- ne plus réserver les avantages aux seuls engagements de contractuels (transfert du financement des APE employés dans les pouvoirs locaux vers le Fonds des communes);
- refinancer le Fonds des communes.

Cotisations patronales

Selon qu'il s'agit d'un agent statutaire ou d'un agent contractuel, le taux global de cotisations de sécurité sociale à verser par l'employeur est très différent.

Le tableau ci-dessous livre une comparaison, à titre illustratif, des taux de cotisation pour un agent nommé à titre définitif dans une administration communale affiliée à l'ONSSAPL (Pool I) et un travailleur contractuel non subventionné.

Taux de cotisation du personnel des administrations publiques locales
(exemple illustratif)

 

Agent nommé à titre définitif

Travailleur contractuel non subventionné

 

Travailleur

Employeur

Travailleur

Employeur

1. Maladie-invalidité

 

 

 

 

- soins de santé

3,55

3,80

3,55

3,80

- indemnités

 

 

1,15

2,35

2. Chômage

 

 

0,87

1,46

3. Pensions (pour l'agent nommé, ONSSAPL – Pool I)

7,50

20,00

7,50

8,86

4. Prestations familiales

 

5,25

 

5,25

5. Accident du travail

 

 

 

 

6. Maladies professionnelles

 

0,17

 

0,17

Total

11,05

29,22

13,07

21,89

Modération salariale

 

6,19

 

6,91

FESC (accueil enfants)

 

0,05

 

0,05

Total général

11,05

35,46

13,07

28,85

Si l'agent contractuel est subventionné, l'écart constaté est encore plus grand: voyez ci-dessous un rappel des réductions accordées par diverses mesures en faveur de l'emploi:
- les contractuels subventionnés (APE): une prime étatique correspondant à une part du coût salarial ainsi qu'une exonération quasi totale des cotisations patronales de sécurité sociale sont accordées;
- Plan Activa: l'exonération sur les cotisations patronales de sécurité sociale est calculée à concurrence d'un forfait qui diffère selon des conditions déterminées;
- convention premier emploi: réduction temporaire forfaitaire des cotisations de sécurité sociale;
- semaine volontaire de 4 jours: dispense de paiement des cotisations patronales de sécurité sociale pour les contractuels engagés en remplacement des agents qui réduisent leurs prestations à 4/5ème d'un temps plein;
- les "article 60": les CPAS bénéficient d'une exonération complète des cotisations patronales de sécurité sociale pour les travailleurs engagés dans le cadre de l'article 60, par. 7, de la loi organique des CPAS;
- Maribel social I: réduction des cotisations patronales de sécurité sociale aux employeurs, sous certaines conditions, qui exercent leur activité principale dans un ou plusieurs domaines relevant de la santé, de l'action sociale ou culturelle. Les réductions de cotisations doivent être intégralement affectées à la création d'emplois supplémentaires;
- programmes de transition professionnelle: les employeurs bénéficient pour les chômeurs occupés dans ce cadre d'une allocation à charge de l'Etat, complétée par une subvention de la Région et/ou de la Communauté et d'une exonération partielle ou totale des cotisations patronales de sécurité sociale.

Ainsi, on observe que les cotisations patronales peuvent atteindre un maximum de 40,46 % (agents nommés à titre définitif dans une commune affiliée au Pool II) et un minimum de 5,72 % (agents contractuels subventionnés).

La pension de retraite

La réglementation relative à la pension en vigueur actuellement n'est pas non plus de nature à inciter les employeurs locaux à recruter du personnel statutaire ou à nommer rapidement leurs agents contractuels, dès lors que l'agent contractuel coûte moins cher à l'employeur en termes de cotisations pensions et que ce même employeur, en nommant un agent vers la fin de sa carrière, pourra assurer son agent du bénéfice d'une pension du secteur public (plus avantageuse que la pension du secteur privé) sans en supporter le surcoût, dès lors que le différentiel de taux de cotisations patronales (8,86 % pour les contractuels et 20 à 22 % pour les statutaires) sera pris en charge par le régime solidarisé.

Pistes de solution:

- création d'une carrière mixte, sans effet rétroactif;
- si effet rétroactif, responsabilisation de l'employeur local en lui faisant supporter le surcoût (en puisant éventuellement dans les réserves constituées dans le cadre d'un second pilier).

(Voir en outre les différentes pistes développées en la matière par la note de réflexion adoptée par le Conseil d'administration en sa séance du 11 janvier 2006 et publiée au Mouvement communal de mars 2006).

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  1. [Remonter] Cette diminution du recours aux emplois statutaires a notamment été mise en évidence par une récente étude de l'ONSSAPL: Emplois contractuels et statutaires: évolution dans le secteur local 1995-2004, disponible sur le site de l'office à l'adresse: http://onssapl.fgov.be/fr/info/rapport%20annuel/onssapl_brochure_complet_2004.pdf .
  2. [Remonter] En ce sens, C.E., 23.11.1994, Commune de Schaerbeek, 50.355.
  3. [Remonter] Pour plus de détails sur ce point, nous renvoyons le lecteur à la contribution du Professeur M. Pâques, L'hypothèse du contrat dans la fonction publique locale in Droit et gestion communale - La fonction publique locale en mutation, Bruxelles, La Charte, 1995, pp. 135 et ss.; v. également E. Gillet et A. Coenen, Le personnel in Communes et régions: quel partenariat pour le XXIème siècle?, actes du colloque organisé par l'Union et le CDGEP le 11.12.1998.
  4. [Remonter] C.E., 24.4.1980, Caers, n° 20.280, C.E., 18.11.1981, Hercot, n° 21.558.
  5. [Remonter] Lequel porte le champ d'application de la loi en précisant que celle-ci "s'applique aussi aux travailleurs (…) occupés par (…), les communes, les établissements publics qui en dépendent, les organismes d'intérêt public (…) qui ne sont pas régis par un statut".
  6. [Remonter] Cet enseignement de la jurisprudence n'est cependant pas toujours adapté à la réalité locale. Ainsi, en déclarant qu'il ne peut être recouru à des agents contractuels que de façon exceptionnelle, le Conseil d'Etat se situe en porte-à-faux avec la politique en faveur de l'emploi menée aux niveaux fédéral et régional, et qui vise à rendre le coût d'un agent moins important pour l'employeur. Ces mesures ne visant que les agents engagés dans les liens d'un contrat de travail, les autorités publiques locales - et plus spécialement encore les communes sous plan de gestion - qui ne profiteraient pas de ces mesures feraient figure de mauvais gestionnaires.
  7. [Remonter] C.E., 18.11.2002, Demoulin, n° 112.590; Trib. trav. Namur, 22.4.1991, Rev. rég. dr. 1991, p. 332; C. trav. Bruxelles, 18.4.2001. Pour une position moins stricte du C.E. quant à la nécessité de preuve du lien contractuel, v. C.E., 4.10.2004, Schtikzelle, n° 135.699.
  8. [Remonter] A.R. 22.12.2000 fixant les principes généraux du statut administratif et pécuniaire des agents de l'Etat applicables au personnel des services des Gouvernements de Communauté et de Région et des collèges de la Commission communautaire commune et de la Commission communautaire française ainsi qu'aux personnes morales de droit public qui en dépendent, M.B. 9.1.2001.
  9. [Remonter] A.G.W. 18.12.2003 portant le Code de la fonction publique wallonne, M.B. 31.12.2003, art. 141 et ss.
  10. [Remonter] V. notamment C.E., 5.10.2001, n° 99.524.
  11. [Remonter] V. p. ex. le décr. du 25.4.2002 rel. aux aides visant à favoriser l'engagement de demandeurs d'emploi inoccupés par les pouvoirs locaux, régionaux et communautaires, par certains employeurs du secteur non marchand, de l'enseignement et du secteur marchand (M.B. 24.5.2002) qui a harmonisé en un seul système différentes subventions existantes (T.C.T, P.R.I.M.E., F.B.I.E., A.C.S. Loi-progr., A.C.S. pouvoirs locaux, A.R. 258 et décr. du 19.5.1994); citons également le Programme de transition professionnelle (PTP) et le Plan Activa, ainsi que le Maribel social ou la Convention de premier emploi (CPE ou "Plan Rosetta").

Formations - Personnel/RH
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Date de mise en ligne
11 Janvier 2007

Auteur
Luigi Mendola

Type de contenu

Matière(s)

Personnel/RH
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